Docteur Pierre NAHON

Chirurgien
Chirurgie Plastique, Reconstructrice et Esthétique


LES GRANDES QUESTIONS > Les chirurgiens > Chirurgiens esthétiques et médias

Les chirurgiens esthétiques et les médias


Les médias raffolent de la chirurgie esthétique

La chirurgie esthétique : un commerce avant tout ?

Les médias ont lié avec la chirurgie esthétique des relations de deux types. Les unes strictement commerciales, les autres d’information, vite transformées, avec le temps, en exploitation tout aussi commerciale.

La publicité pour la chirurgie esthétique est interdite

Entre les années 1975 et 2004, bien que toute publicité directe ou indirecte soit interdite aux médecins, beaucoup d’entre eux ne respectaient pas cet article du code de déontologie. Ils exploitaient le fait que la publicité directe soit autorisée pour les structures commerciales comme les cliniques, en faisant faire cette publicité par l’établissement. Ils payaient ces publicités directes sur la chirurgie esthétique en association avec la direction de l’établissement, et tous deux profitaient des retombées. Ces publicités étaient basées sur le même principe que la publicité en général. La conception et la rédaction de l’encart étaient confiées à une agence, qui s’occupait aussi de l’achat d’espaces pour cette promotion. La cible étant principalement les femmes, ils envahissaient les journaux féminins.
Certains magazines de santé s’étaient même fait une spécialité dans la diffusion de ces publicités payantes sur la chirurgie esthétique. Ils jouaient alors un rôle extrêmement ambigu et malhonnête, informant d’une part leurs lecteurs, dans leurs articles, des risques de la chirurgie esthétique mal faite , alors qu’ils diffusaient d’autre part des publicités pour des établissements parfois des plus douteux. Sans compter que l’information qu’ils étaient alors censés délivrer était complètement tronquée, puisque les journalistes n’étaient pas en mesure de parler véritablement des établissements en quête d’espaces dans leurs publications.
Aucun média, puisqu’il en vit, n’a jamais refusé de vendre de l’espace à une clinique de chirurgie esthétique, quelle que soit sa médiocrité, même s’il savait pertinemment, à l’époque, qu’il s’agissait de faire de la publicité interdite pour les praticiens qui exerçaient en son sein. Chacun ne voyait dans ces méthodes que l’intérêt financier de l’affaire.

Lorsque la publicité a dépassé le stade des journaux pour s’afficher à la télévision, le Conseil de l’Ordre des Médecins et le Ministère de l’Économie, envahis par les lettres de plaintes de médecins, mais aussi de patients, se sont penchés sur le problème. Ils se sont tous deux rendus compte qu’ils avaient été parfaitement laxistes en matière de contrôle de la publicité, et ont commencé à réfléchir à l’interdiction pure et simple de ces pratiques.

A côté de cette publicité directe payante, les journaux et les télévisions se sont vite rendu compte que les sujets sur la chirurgie esthétique faisaient vendre . À partir du moment où ils ont montré leur intérêt pour cette discipline, les émissions télévisées et les journaux se sont emparés du sujet, et l’ont traité de manière régulière.
L’impact de la télévision est, de loin, le plus important. Jusqu’au milieu des années quatre-vingt-dix, les émissions consacrées à la chirurgie esthétique étaient peu différentes du reste des programmations médicales. Le sujet était abordé exceptionnellement par des professionnels, et ceux-ci délivraient en plateau une information très médicale. Les règles de déontologie étaient respectées, les chirurgiens esthétiques abordaient les problèmes techniques et les aspects psychologiques de leur métier.

L’absence de contenu informatif des articles et émissions sur la chirurgie esthétique

Les sujets sur la chirurgie esthétique sont, assez régulièrement, de mauvaise qualité. Les journalistes responsables ont rarement une véritable connaissance du sujet, et peu d’intérêt pour les véritables motivations, risques ou difficultés de la chirurgie esthétique à obtenir de beaux résultats. Leur but se rapproche plutôt, en réalité, de trouver le témoin le plus spectaculaire, capable, par exemple, de se faire faire l’intervention la plus incongrue, voire la plus folle possible. Au final, plus on s’éloigne de la vérité chirurgicale, avec son côté universitaire... et plus les médias pensent qu’ils réaliseront une bonne performance...

Si 90 % des sujets réalisés sont en définitive médiocres, en raison de leur mode de construction, les 10 % restant tentent, et c’est un peu nouveau, d’avoir un discours plus réaliste sur le sujet. Quand les médias cesseront de prendre les téléspectateurs pour des idiots, et que les chiffres de l’audimat sur le sujet seront toujours aussi bons, elles évolueront peut-être vers de vraies émissions d’informations.